A quoi servent les « pédophiles » ? par Claude Guillon
NOTES DÉSORDONNÉES EN PRÉLUDE A UN DÉBAT (consultables sur : http://claudeguillon.internetdown.org)
S'agissant
d'ordre moral, j'indiquerai rapidement quelques-unes des pistes de
réflexion et des interrogations que j'utilise dans l'élaboration d'un
livre à paraître sur le rôle dévolu, dans les médias et l'imaginaire
collectif, à la figure du « pédophile », et aux enseignements que nous
pouvons en tirer quant à la manière dont le corps et l'érotisme sont
vécus et socialisés.
Comment se fait-il que les rapports
érotiques avec des « enfants », comportement que l’ont dit (découvre ?)
extrêmement répandu, pour ne pas dire commun, et qui semble susciter
(soudain ?) une réprobation unanime, ait pu perdurer dans l'ignorance (
?),l'indifférence ( ?) ou la complicité ( ?) générales ?
S'il
s'agit de rapports sans violence physique particulière, mais plutôt
d'attouchements par exemple, on entend dire couramment qu'il faut «
foutre la paix aux enfants ». Plus que la représentation, évidemment
fantasmatique, de l’enfance comme moment de pureté, me frappe ici
l'image très négative, violente, voire criminelle de la dite «
sexualité ».
Autrement dit: la « sexualité », ces gestes
honteux, ce crime, cette faute ( ?) que tout le monde commet (subit ?),
les enfants la découvriront « bien assez tôt ». On remarque que la
« sexualité » a un statut unique du point de vue de la mentalité
éducative. En effet, on dira d'autres formes de contrainte (se lever
tôt, aller à l'école cinq jours sur sept, obéir au maître, se taire,
etc.), y compris de contrainte physique très violente exercée sur des
nourrissons (supporter la faim, ne manger qu'à des heures fixées par
d'autres, « se régler »), qu'elles doivent être imposées et intégrées
le plus tôt possible. Il existe bien des violences, des souffrances,
identifiées comme telles, et jugées formatrices.
On avance
souvent l'idée que l'enfant, n'ayant ni information ni représentation
de la « sexualité », ne peut être que traumatisé par sa découverte.
Paradoxalement, on déplore aussi, que, du fait même de son ignorance,
l'enfant n'ait pu, sauf violence particulière, réaliser le caractère
immoral ( ?), délictueux, traumatisant ( ?), des gestes échangés ou
subis.
Le rapport « pédophilique » serait donc, pour l'enfant
concerné, une initiation jugée prématurée ( ?), mal faite ( ?), brisant
un tabou, un lien social ( ?). Mais dans cette hypothèse, quel peut
être ce « lien », ce « secret » partagé ( ?) par les adultes, et dont
les enfants doivent être écartés ? (Jusqu'à quel âge au fait ?)
Les
campagnes de prévention cherchent à donner à l'enfant une image du «
pédophile » ; elles donnent en creux une image de la « sexualité »
comme gratification que les enfants peuvent légitimement refuser à
l’adulte.
Dès lors, comment se fait-il qu'un garçon ou une fille
de moins de quinze ans, auquel [le] la loi ne reconnaît pas le droit de
refuser quoi que ce soit d'autre de ce que les adultes entendent lui
imposer, soit supposé[e] ne pouvoir accepter on désirer le plaisir
charnel?
Difficile d’imaginer dans le discours dénonciateur de
la « pédophilie », et le plus souvent ( ?) chez le « pédophile »
lui-même, un rapport érotique autre que copié sur le modèle
machiste-reproducteur : la pénétration (vaginale ou anale).
Autrement dit, difficile d'imaginer un érotisme adapté au partenaire
(en l'espèce, par hypothèse, un enfant impubère), quel que soit son
âge, ses goûts, son histoire et son développement sexuel. Pourquoi
un[e] amant[e] capable de tendresse et d'attention envers un[e]
partenaire de trente ans, ne saurait-il/elle pas en faire montre avec
un[e] partenaire de dix ans ?
Il n'est pas étonnant qu’en
matière de « comportements sexuels », le pire soit réservé aux enfants,
puisque l'ensemble des agissements adultes leur assigne le dernier rang
dans la hiérarchie sociale, du point de vue du droit à la dignité, et
le premier quant à la production de honte. Les parents ont honte de
leurs enfants.
Les adultes ont honte d'eux-mêmes et de ce qu’ils
s'infligent dans les rapports de sexe (hommes, le plus souvent) ou y
subissent (femmes, le plus souvent).
La violence, la contrainte,
le viol, ne semblent pas considérés seulement, et normalement
oserais-je dire, comme des caricatures de la « sexualité » (on ne dit
pas « érotisme », qui suppose culture hédoniste, jeu, etc.), mais comme
une représentation fidèle de celle-ci, révélée trop tôt ( ?) aux
enfants.
La prise de conscience (relative, confuse, et porteuse
de régressions moralistes et théoriques) des violences (entre autres
sexuelles) faites aux enfants, peut-elle ouvrir pour eux de nouveaux
droits ?